La truffe blanche, l’or d’Italie menacé par les ravages du climat

Cueillette de truffes dans le Piémont italien

Carlo Marenda se promène avec son chien Buk dans un vignoble des Langhe à Treiso, près d'Alba, le 29 octobre 2024 © AFP MARCO BERTORELLO

Alba (Italie) (AFP) – Au fin fond d’une épaisse forêt du Piémont italien, la chasse à la truffe blanche d’Alba bat son plein. Excités, les chiens zigzaguent et creusent le sol. Mais ce trésor culinaire se fait toujours plus rare, mis à mal par le changement climatique.

« Allez cherche! Où elle est? ». Carlo Marenda, chasseur de truffes à ses heures perdues, apostrophe Gigi, sept mois, et Buk, 13 ans, des croisements entre le Spinone et le Lagotto romagnolo, connus pour leur odorat d’une grande finesse.

Sur un sol boueux, les feuilles d’automne crissent sous le poids des bottes. En contrebas d’un vignoble pittoresque à flanc de colline, non loin d’Alba, les sentiers serpentent le long du Rio della Fava, traversant un terrain humide propice à la pousse de cet « or blanc ».

Recherchée par les gourmets et chefs étoilés du monde entier, la truffe blanche d’Alba, la plus prestigieuse du monde, est un champignon souterrain qui pousse en symbiose avec certains arbres en s’attachant à leurs racines.

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Son parfum intense et raffiné, mélange entre foin, ail et miel, permet aux chiens de chasse de la détecter, jusqu’à un mètre de profondeur.

Initié à la chasse à la truffe dès l’âge de cinq ans par un ami de sa famille, Carlo Marenda, 42 ans, a fondé en 2015 l’association « Save the truffle » (Sauver la truffe), aux côtés d’Edmondo Bonelli, chercheur en sciences naturelles.

C’est un solitaire « trifulau » octogénaire, Giuseppe Giamesio, connu sous le nom de « Notu », le dernier descendant d’une famille à la tradition truffière centenaire, qui lui a légué ses chiens et son savoir avant sa mort en 2014.

Le message du « maestro » en guise de testament : « Si nous voulons éviter la disparition de la truffe, nous devons protéger les forêts, cesser de polluer les cours d’eau et planter de nouveaux arbres truffiers ».

Dix ans plus tard, grâce à des dons et au soutien de certains viticulteurs, l’association a planté plus de 700 arbres truffiers dans la région vallonnée des Langhe, dont des peupliers, chênes et tilleuls.

L’héritage de Notu

« Notu m’a transmis sa passion pour la chasse aux truffes et la préservation des arbres », confie Carlo Marenda, en sortant de sa Fiat Panda 4X4 gris métallisé, voiture fétiche des chasseurs de truffes.

En 30 ans, les surfaces dédiées à la truffe blanche en Italie ont chuté de 30%, cédant peu à peu la place aux vignobles, plus rentables, mais aussi aux noiseraies.

Les collines des Langhe fournissent une grande quantité de noisettes au géant du chocolat Ferrero, fondé en 1946 à Alba, petite ville prospère de 30.000 habitants.

Mais la principale menace pour la truffe blanche, dont la cueillette a été classée en 2021 au patrimoine immatériel de l’humanité de l’Unesco, est le changement climatique.

Le réchauffement de la planète, la sécheresse, la déforestation et des variations brusques de températures sont autant de facteurs qui fragilisent l’habitat naturel de ce champignon.

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Pour survivre, la truffe a besoin de froid et d’humidité. Or, en ce début de novembre, le thermomètre est monté à 20 degrés. « Avec la prolongation de l’été, la production baisse », déplore Carlo Marenda.

Flambée des prix

La récolte, qui court d’octobre à fin janvier, se raccourcit. Et en attendant les grands froids et la neige, « l’arôme des truffes n’est pas encore à 100% et elles se conservent moins longtemps ».

L’effet des pluies abondantes de ces dernières semaines peut aussi être néfaste: « S’il y a trop peu d’eau, la truffe ne pousse pas. S’il y en a trop, elle pourrit ».

Alerté par son chien Buk, il s’accroupit au sol pour gratter délicatement la terre avec une bêche étroite pour extraire une truffe de taille plutôt modeste.

La truffe blanche, une espèce en voie de disparition? « Pas pour l’instant. Mais si nous n’agissons pas, elle risque de le devenir », estime Mario Aprile, président de l’association des chercheurs de truffes piémontais.

« La truffe blanche n’est pas cultivable, contrairement à la noire. Sans arbres, il n’y a pas de truffes. Nous en plantons pour reconstruire la biodiversité ».

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Face à une demande qui explose et une offre limitée, la truffe blanche s’échange à prix d’or, pour atteindre 4.500 euros le kilo cette année à la grande foire d’Alba qui s’achève le 8 décembre.

Deux truffes « jumelles » d’un poids total de 905 g, une trouvaille de Mario Aprile, ont été adjugées dimanche 140.000 euros à un magnat de la finance de Hong Kong lors de la traditionnelle vente aux enchères de bienfaisance d’Alba.

© AFP

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