Le 30 mars, Grenoble est devenue la première grande ville dirigée par un maire écologiste. Mais dans de plus petites villes, des candidats écologistes ont décroché de très bons scores. A Loos-en-Gohelle, ville de près de 7000 habitants du Pas-de-Calais, le maire Jean-François Caron est l’un des candidats écologistes les « mieux » élus en France. Réunissant plus de 80% des suffrages en 2008, il était le seul candidat à sa succession cette année et a donc été réélu avec 100% des voix. Engagé très tôt en faveur de l’écologie, sa ville est considérée ville pionnière du développement durable. Interview d’Adam Prominski, son directeur de cabinet.
À quoi est dû selon vous ce succès du maire Jean-François Caron et pourquoi dit-on de Loos-en-Gohelle qu’elle est la ville pionnière du développement durable ?
La réussite du maire Jean-François Caron, et avant lui de son père Marcel Caron, fut de faire d’un territoire meurtri par le développement non durable de la mine un modèle de développement durable. Dès 1995, alors conseiller municipal délégué à l’aménagement du territoire et à l’environnement, Jean-François Caron met en place une charte du cadre de vie, déclinée avec l’ensemble des parties prenantes, qui lui permet d’engager de nombreux chantiers en faveur du développement durable : expérimentation sur le solaire sur les toits de l’église et le site minier de la Base 11/19, gestion différenciée des espaces verts, développement du bio en restauration collective, réhabilitation énergétique de quartiers…
D’année en année, le site minier a été transformé en un cluster du développement durable. Il accueille aujourd’hui un centre de développement des éco-entreprises (cd2e), un centre permanent d’initiatives pour l’environnement (la Chaîne des Terrils), un centre de ressources sur le développement durable (CERDD), une plateforme d’expérimentation sur le solaire, un bureau d’études spécialisé dans l’écoconstruction…
Par ailleurs, le développement durable pose la question des besoins préalables à toute action. La participation citoyenne, parce qu’elle permet une meilleure expression des besoins, s’est inscrite très tôt dans la politique de Marcel Caron et de son fils. Ce lien très étroit entre les citoyens et la municipalité a permis de développer une confiance réciproque au sein de la commune. Elle s’est retrouvée dans les urnes.
L’ancien site minier a une place très importance à Loos-en-Gohelle. Pouvez-vous nous en dire plus sur la « Base 11/19 »?
L’exploitation des mines dans le Nord était synonyme de réussite industrielle et de plein emploi. A la fermeture des mines en 1986, toute la région est fortement frappée par la crise. Marcel Caron, père de Jean-François Caron alors maire de la ville, décide de faire en sorte que les habitants se réapproprient leur histoire minière et ne la rejettent pas, contrairement à ce qui s’est passé ailleurs dans le bassin minier. Deux terrils ainsi que d’anciens bâtiments de l’exploitation minière ont été conservés et sont ouverts au public : ils constituent la « Base 11/19 ». Ces terrils sont les plus hauts d’Europe et reçoivent 40000 visiteurs par an. La réappropriation de l’histoire minière s’est manifestée principalement à travers la culture sous le mandat de Marcel Caron puis à travers le développement durable avec Jean-François Caron. La création de la Chaîne des Terrils, structure d’éducation environnementale, valorise le bassin minier en tant que support d’une biodiversité particulière. Auparavant friche minière abandonnée, la Base 11/19 est aujourd’hui un pôle de référence du développement durable, grâce aux nombreuses structures qui s’y sont développées.
Le succès de la politique de Loos-en-Gohelle est en grande partie dû à la participation des habitants aux décisions municipales. Comment cette participation est mise en œuvre ?
Trop souvent, quand un projet est mis en place dans les autres communes, il est présenté a posteriori aux habitants. Ceux-ci peuvent exprimer leur accord ou leur désaccord et proposer d’éventuelles modifications mais la plus grande partie du travail est déjà réalisée. Au contraire, à Loos-en-Gohelle, la participation des habitants a lieu en amont. Par exemple, quand des opérations ont lieu dans une rue, les habitants du quartier sont réunis pour que leur expertise soit prise en compte dès le départ, puis le bureau d’étude travaille en collaboration avec les citoyens. La participation active des habitants est très importante car ils sont les meilleurs experts du lieu où ils vivent. Quand il s’agit de projets plus globaux, tel que l’écriture du plan d’aménagement et de développement durable (PADD), nous travaillons avec un groupe d’habitants tiré au sort parmi les listes électorales. Cela permet de travailler avec un groupe d’habitants représentatif de la ville.
Cette démarche demande plus de temps et n’est pas toujours aisée à mettre en place. Mais en définitive c’est un échange gagnant-gagnant. Les décisions politiques se fondent sur l’expertise des habitants et sur une meilleure connaissance du terrain. Elles sont mieux acceptées par les citoyens qui se l’approprient plus facilement. Un climat de confiance et de respect mutuel se crée ainsi entre habitants et équipe municipale.
La démocratie participative à Loos-en-Gohelle se fonde sur le principe du « fifty-fifty». En quoi cela consiste exactement?
Le programme « fifty-fifty » a été mis en place pour encourager les initiatives participatives. La commune soutient financièrement et techniquement un projet souhaité par un groupe d’habitants ou une association, mais la réalisation ou la gestion est effectuée par les demandeurs. Par exemple, la commune fournit les jardinières et les fleurs aux habitants qui veulent améliorer le fleurissement de leur rue, puis les habitants se chargent eux-mêmes de l’arrosage et de l’entretien. Je peux citer un autre exemple : la ville finance une partie des prix des permis de conduire des jeunes en échange de menus travaux d’intérêt général dans la ville. Le tissu associatif est très important à Loos-en-Gohelle. Ce rapport gagnant-gagnant crée une synergie entre la municipalité et ses habitants. Et explique en partie le score éléctoral du maire.
Propos recueillis par Hélène GÉLOT
3 commentaires
Ecrire un commentaire
Loos-en-Gohelle, ville pionnière du d&ea...
[…] Loos-en-Gohelle ville est considérée ville pionnière du développement durable. Interview d’Adam Prominski, directeur de cabinet du maire Jean-François Caron […]
Loos-en-Gohelle, ville pionnière du d&ea...
[…] Loos-en-Gohelle est considérée ville pionnière du développement durable. Interview d’Adam Prominski, directeur de cabinet du maire Jean-François Caron "Le 30 mars, Grenoble est devenue la première grande ville dirigée par un maire écologiste. Mais dans de plus petites villes, des candidats écologistes ont décroché de très bons scores. A Loos-en-Gohelle, ville de près de 7000 habitants du Pas-de-Calais, le maire Jean-François Caron est l’un des candidats écologistes les « mieux » élus en France. Réunissant plus de 80% des suffrages en 2008, il était le seul candidat à sa succession cette année et a donc été réélu avec 100% des voix. Engagé très tôt en faveur de l’écologie, sa ville est considérée ville pionnière du développement durable. Interview d’Adam Prominski, son directeur de cabinet…" […]
Loos-en-Gohelle, ville pionnière du d&ea...
[…] Loos-en-Gohelle ville est considérée ville pionnière du développement durable. Interview d’Adam Prominski, directeur de cabinet du maire Jean-François Caron […]