Pauvres et riches inégaux face à la pollution de l’air à Paris

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La tour Eiffel à Paris lors d'un pic de pollution en 2014 © © AFP PHOTO / THOMAS SAMSON

« A Paris, le risque de mourir de la pollution de l’air est 5 fois plus élevé pour les plus pauvres par rapport au reste de la population », assène Denis Zmirou, professeur de Santé Publique. « Les habitants des quartiers les plus défavorisés encourent un risque plus important de décéder à court-terme en cas de pic de pollution, et ce d’autant plus que la pollution à long-terme est élevée là où ils résident ». Denis Zmirou est l’un des auteurs d’une étude française sur les inégalités face à la pollution de l’air à Paris, publiée dans la revue scientifique Plos One sous le titre Neighbourhood Characteristics and Long-Term Air Pollution Levels Modify the Association between the Short-Term Nitrogen Dioxide Concentrations and All-Cause Mortality in Paris. Elle conclue que les plus défavorisées vivant à Paris sont les premières victimes de la pollution de l’air.

Ainsi, selon cette étude, dans les jours suivants une augmentation de 10 μg/m3 de la concentration de dioxyde d’azote (NO2) dans l’air, les résidents des quartiers défavorisés ont 3,14 % de chances en plus de décéder, contre à peine 0,08 % de chances en plus pour les habitants des quartiers riches.

Pour obtenir ces résultats, les chercheurs de l’École des hautes études en santé publique (EHESP)  ont analysé les causes de 79107 décès survenus à Paris chez les habitants de plus de 35 ans entre 2004 et 2009. Ils ont établi une carte des concentrations de la pollution aux NO2 et une autre de la répartition de la population parisienne en fonction de son appartenance sociale.

Carte de Pairs extraite de de l'étude. Catégory 1 désigne les quartiers les plus favorisés, category 2 les quartiers intermédiares et category 3 les zones les plus défavorisées.
Carte de Pairs extraite de de l’étude. Catégory 1 désigne les quartiers les plus favorisés, category 2 les quartiers intermédiaires et category 3 les zones les plus défavorisées.
Carte extraite de l'étude montrant les concentrations de pollution au dioxyde d'azote NO2 à Paris.
Carte extraite de l’étude montrant les concentrations de pollution au dioxyde d’azote (NO2) à Paris.

« Mais, alors que les deux cartes ne se superposent pas complètement, ces résultats montrent que les sujets résidant dans les territoires défavorisés sont plus vulnérables aux épisodes, même brefs, de pollution atmosphérique. Ils indiquent surtout que, si elle est également exposée chroniquement à des niveaux élevés de dioxyde d’azote, cette population subit un risque encore plus élevé lors des pics de pollution », écrivent-ils. Des études précédentes avaient déjà montré que les plus pauvres étaient aussi souvent les plus exposés et vulnérables à la pollution en raison de leur travail, de leur lieu d’habitation (plus proche des grands axes routiers ou des usines, moins bien isolée).

Interrogé sur les solutions, le chercheur cite l’amélioration de l’habitat, du réseau de transport et la création d’espaces verts. Mais, il insiste surtout sur le rôle de la mixité sociale dans l’aménagement du territoire « pour éviter la constitution de ghettos, car les politiques de mixité sociale garantissent une politique de qualité de vie sur un territoire en ce qui concerne la pollution de l’air, le bruit, la création d’espaces verts ou encore l’habitat. ». Or, il constate que l’environnement contribue à accentuer les inégalités sociales de santé. En effet, les populations les plus défavorisées se retrouvent concentrées dans les endroits les plus pollués tandis qu’elles disposent de moins de capacité de se faire entendre ou représenter auprès des autorités.

« L’étude abonde dans notre sens, elle rappelle aussi qu’une exposition ponctuelle à la pollution nuit à la santé. Elle renforce ce qu’on sait déjà. Paris est polluée. Et en partie autour des grands axes de circulation et à cause des véhicules au diesel, qui sont responsables de 90 % des émissions de NO2. Ce sont les plus pauvres, qui vivent près du périphérique qui sont les premiers à en subir les conséquences », commente Sebastien Vray (voir notre interview Pollution de l’air, des progrès mais une situation encore  inquiétante) de l’association Respire. Il milite pour une meilleure qualité de l’air. « Des mesures, mêmes symboliques, comme interdire les véhicules les plus polluants, même s’ils sont proportionnellement pas les plus nombreux, sont des premiers pas ».

La mairie de Paris prend des mesures pour réduire la pollution de l’air, comme l’interdiction de circuler dans la capitale pour les cars et les poids-lourds de plus de 10 ans, les plus polluants et souhaiterait bannir le diesel de la ville d’ici à 2020.

Julien Leprovost

 

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