De moins en moins paysanne, de plus en plus industrielle, l’agriculture française est en crise. En concurrence les uns avec les autres dans le contexte d’une mondialisation croissante des échanges des produits agro-alimentaires, nos agriculteurs ont été pour la plupart contraints de mécaniser, motoriser, « chimiser » et spécialiser outrancièrement, leurs systèmes de culture et d’élevage. Au risque bien souvent de devoir agrandir leurs exploitations, remembrer leurs parcellaires, abattre les haies vives, labourer et irriguer trop fréquemment leurs terrains, raccourcir les rotations de cultures, simplifier leurs assolements, épuiser les nappes phréatiques, multiplier les traitements pesticides, confiner leurs élevages dans des bâtiments hideux et exigus, concentrer d’énormes quantités de lisier et de purin, exposer les sols à l’érosion, etc. Avec malheureusement pour conséquences : des paysages totalement défigurés, des bocages en disparition, une pollution croissante de l’air et des eaux, la prolifération d’algues vertes sur le littoral, l’effondrement des abeilles, des inondations plus fréquentes et dramatiques dans les vallées, etc.
Faute de pouvoir rester compétitives, nombreuses ont été les familles paysannes qui ont dû quitter leurs régions d’origine, leurs « pays », et chercher tant bien que mal un autre emploi ailleurs. Au départ des paysans, succède bien souvent la fermeture des magasins, des cafétabacs, des écoles, des postes et d’autres services publics. Les « pays » perdent progressivement de leur attractivité et un grand nombre de nos campagnes sont en voie de désertification,
tandis que les meilleures terres agricoles sont bitumées sous l’emprise d’une urbanisation souvent mal contrôlée.
Nous savons pourtant qu’il serait techniquement possible de développer en France une grande diversité de systèmes de production agricole, capables à la fois de fournir des produits sains pour notre alimentation et de préserver la beauté des paysages locaux, en réduisant la pollution de nos territoires ruraux et en préservant les potentialités productives de nos campagnes sur le long terme. Ces types d’agricultures associent étroitement l’agriculture et l’élevage tout en valorisant au mieux les caractéristiques propres de chacun des terroirs. Mais ces formes d’agricultures intensément écologiques et particulièrement résilientes sont aussi très artisanales et donc exigeantes en travail, intensives en emplois. Il s’agit d’agricultures authentiquement paysannes qui ne pourront cependant guère survivre ou se développer que si les paysans travaillant pour leur propre compte dans leurs « pays » puissent être correctement rémunérés.
Comment les organisations de la société civile et les collectivités territoriales les plus soucieuses de sauvegarder la biodiversité et la qualité de vie dans nos campagnes, de promouvoir les emplois et le maintien d’activités diverses et conviviales en monde rural, tout en assurant une alimentation de grande qualité sanitaire et gustative dans les cantines des écoles, des collèges et des lycées, pourraient-elles contribuer au maintien ou à la promotion de ces formes d’agricultures paysannes les plus respectueuses des paysages ? Telle est la question qui sera débattue au cours de ce colloque.
3 commentaires
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Bousquet Jean-Marc
Bonjour, Je suis issu d’une famille de paysans (viticulteur d’un côté agriculteur de l’autre). Les problèmes de ces gens courageux me tiennent particulièrement à coeur. Et les solutions (s’il y en a) ne sont pas évidentes du tout. Pour mon humble part, je pense que tous ceux qui sont attachés à la qualité des paysages (que le monde entier nous envie) devraient faire un tourisme participatif aux tâches de ces jeunes. Jeunes ? Oui ! Car, autrefois les fermes regorgeaient de gens et d’animasux. Et les tâches étaient réparties entre parents et enfants. Aujourd’hui, seuls, quelques enfants ont à faire face à l’exploitation de surfaces parfois (si ce n’est souvent) démesurées. Ils n’ont donc pas le temps d’entretenir les abords en se concentrant sur l’essentiel. Aussi, les chemins et autres rivières sont laissés en jachère. Certaines communautés de communes tentent de participer à cet entretien. Mais la tâche est rude. Nous devrions prêter main-forte à ces passionnés. Par ailleurs, les tracteurs ne font pas tout ! Les subventions pleuvent pour les aider mais elles sont mal utilisées. Je connais un paysan qui a 17 tracteurs (passionné qu’il est de ces mécaniques rutilantes ou encore passées de mode. Ce n’est pas le but. Mais ? çà tombe. Alors, ils achètent des matériels. D’autres sont à la peine et n’ont que le peu pour vivre. Solution ????
DUVAL Gilbert
Beau texte qui pose bien le problème mais la photo : une vache qui ressemble à une normande aux 3 couleurs dans un paysage avec des arbres qui ressemblent à des cocotiers. Jamais vue Normandie, peut-être le réchauffement climatique ?
POBLETE Hernan
Bravo pour UTOPIA et ceux qui organisent ce colloque.
La misère actuel des agriculteurs est d’une injustice immense, fruit d’une très longue série d’erreurs historiques de notre civilisation, d’une ambition aveugle de certains et d’un manque de vision « long terme » impardonnable des politiciens qui nous gouvernent.
Si nous pouvons aider avec cette si noble cause… je mets nos humbles moyens audiovisuels à la disposition des organisateurs.
Hernan POBLETE
Président et Fondateur
http://www.supervision.fr