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Le crapaud : un dimanche à glaner


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Nous republions ici un article du blog le Crapaud tenu par Robert Fiess. Son site, ilustré avec des dessins de crapauds, promeut une écologie positive et son billet aborde le glanage.

Scandale planétaire, les aliments destinés à notre consommation sont pour un tiers perdus ou gaspillés, soit en coût 1 000 milliards de dollars. Partout, on essaie de corriger ce formidable gâchis. Parfois par des actions toutes simples, mais symboliques. Ainsi, des glaneurs sur les marchés de Paris et d’ailleurs.

Grande et belle femme, Anna jouit rarement du déjeuner dominical. À 13 heures, elle se retrouve, soit sur le marché de Joinville dans le 19 ème arrondissement, soit sur celui de la Bastille.

La voici avec ses bénévoles en gilet jaune pour récupérer les fruits et légumes du jour, qui n’ont plus de chance d’être vendus, de plein accord avec les commerçants. Ils serviront à la collecte de son association « Moissons solidaires ».

Une vieille pratique

Réunies autour d’un tréteau, quelques dizaines de personnes attendent la distribution de cette récupération, qu’« on essaie de servir de façon aussi équitable que possible, par des portions qui peuvent parfois atteindre 10kg, voire plus », souligne Anna, mais pas avant que les commerçants aient plié boutique.

Droit coutumier, le glanage est aussi vieux que l’activité humaine, illustré par le célèbre tableau de Jean-François Millet (1857) de ces paysannes en fichu, dos cassé, ramassant les épis de blé restés au sol.

Et sur les marchés alimentaires des villes, qui ne s’est jamais étonné encore aujourd’hui de voir des Sdf, mais aussi des personnes retraitées, voire des étudiants ramasser sur le trottoir ou dans les poubelles les denrées récupérables, avant l’arrivée des éboueurs.

Sous la tente

Entre temps, le glanage s’organise. À Lille, voici 5 ans, une « Tente des glaneurs » voit le jour, à l’instigation d’un ancien chef cuisinier gastronomique.

Avant, rappelle-t-il volontiers, « il donnait à manger aux riches, maintenant il donne richement à manger ». Une manière primordiale, à ses yeux, de répondre à la précarité de beaucoup tout en luttant contre le gaspillage de tous.

C’est à Lille donc, qu’Anna a vécu une sorte de révélation. Directrice de clientèle, elle se sentait en état, famille grandie, de donner de son temps à une « conviction forte », et c’est là qu’elle va trouver, par hasard, ce qu’elle cherchait inconsciemment : une idée simple, juste, lumineuse.

70 tonnes

Avec elle et le fort soutien de la mairie, les glanages organisés à Paris n’ont pas tardé à prendre de l’ampleur, notamment dans le 19ème, qui compte un quart de sa population sous le seuil de pauvreté.

Aidée par près de 1 300 bénévoles, l’association a accueilli 6 100 personnes et, en l’espace de 2 années, distribué 70,5 tonnes de fruits et légumes, selon les saisons (hors viande, poisson, œufs, lait trop soumis à règlement).

Bénévolat à la carte

Vient qui veut, quand il veut, le temps qu’il peut, il suffit de se présenter au tréteau des »Moissons ». Avantage, même lorsqu’on a fait la fête la veille, le rendez-vous de 13 heures n’est pas hors de portée.

Notre ami du crapaud, Jérôme, est allé lui-même donner un coup de main un dimanche au marché de la Bastille. Il en est revenu enthousiasmé.

Un peu de bonheur

«  C’est une joie communicative entre tous, ceux qui collectent, ceux qui reçoivent, les commerçants eux-mêmes, dont certains offrent des produits qu’ils auraient pu vendre encore le lendemain. Tous ont le sourire qui éclaire leur visage », constate-t-il.

« Nous voyons plein de jeunes qui veulent s’investir, des actifs aussi. Dans un monde totalement déboussolé, aider les autres, c’est aussi se donner un peu de bonheur à soi-même», ajoute Anna.

Tarte aux poireaux

Bonne humeur, ouverture aux autres, partage, ces initiatives créent également du lien social. Mais l’objectif, pour Anna, sera de boucler la boucle.

Récemment, à l’occasion de l’anniversaire de Moissons, des personnes ont fait la surprise d’arriver avec des tartes aux poireaux, cuisinées chez elles, ces poireaux reçus de la collecte précédemment, tartes qui seront partagées entre tous les participants, y compris les commerçants.

Soupe populaire

Dans le même esprit s’organisent des « disco soup ». Un rendez-vous est donné sur un marché, y vient qui veut, avec ses propres ustensiles de cuisine, pour éplucher et cuisiner ensemble la soupe de légumes récupérés qu’on dégustera après. Le tout en musique, disco bien sûr.

C’est à Berlin que des militants de la cause « slow food » découvrent cette autre forme de soupes populaires et s’en inspirent. Le concept gagne rapidement Paris et la province.

On légifère enfin

Après Lille, la Tente des glaneurs a déjà essaimé à Grenoble, Caen, Armentières. « Moissons solidaires » a reçu l’aval pour se développer sur 2 autres marchés parisiens, elle espère aussi collecter, avec l’aide de moyens de transport mis à disposition par le Recueil social de la Ratp, le ramassage dans les grandes surfaces.

Car on sait que la lutte contre le gaspillage est entrée dans notre législation. Adoptée à l’unanimité en décembre par l’Assemblée nationale, la loi interdit désormais aux grandes et moyennes surfaces de 400 m2 de jeter de la nourriture invendue encore consommable.

Sacrée poubelle

Quant aux industriels de l’agroalimentaire, ils peuvent faire don de produits refusés par le commerce, arrivés trop tard ou mal étiquetés. Tant que la qualité sanitaire n’est pas en cause.

En France, entre 90 et 140 kg de nourriture se perdent par habitant, de la production à la consommation. Et sur les 20 à 30 kg/an, que chaque Français jette à la poubelle, 7 ont encore leur emballage d’origine.

7 commentaires

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  • Bonjour , savez-vous que La Tente des Glaneurs c’est implanté à paris sur le marché de Joinville ?
    Anna Morisseau en est même la présidente . La Tente des Glaneurs est une association franchisée , marque déposée et protégée . Je trouve dommage que cela ne soit pas repris correctement , mais peut-être y a t il une volonté de Mme Morisseau de tire un peu la couverture …. Je vous invite à vous rendre sur la page Facebook de La tente des Glaneurs pour découvrir notre Solidaventure . La tente des Glaneurs c’est aussi le Banquet des Chefs contre attaquent avec Cyril Lignac , Florent Ladeyn … un partenariat avec La Fondation Goodplanete et Human ….
    Jean-Loup Lemaire Fondateur et propriétaire .

      • Tom Arthus-Bertrand

      Personnellement je trouve ça très moyen de parler « Des Moissons Solidaires » dans cet article, alors que c’est une copie conforme de LA TENTE DES GLANEURS qui existe depuis prés de 5 ans dans toute la France. Mme Morisseau (fondatrice « Des Moissons Solidaires) semble s’approprier toutes les idées et les valeurs de LA TENTE DES GLANEURS . Ce qui en soi ne serait pas grave (car ces valeurs sont universelles) si elle n’était pas la présidente de LA TENTE DES GLANEURS du 19 em arrondissement de Paris depuis 2 ans .La tente des glaneurs est en train de se développer consciencieusement sur Paris et il me semble que Mme Morisseau cherche à surfer sur la vague pour se mettre en avant au détriment de ceux qui font ça humblement depuis des années .Tom Arthus-Bertrand

      • Bonsoir Tom,
        Votre prénom me rappelle bien des grandes heures vécues avec Anne et Yann dans les années 80… C’est vrai que le billet souffrait de quelques précisions concernant la Tente des glaneurs à Paris, elles ont été rectifiées entre temps. Robert

    • Elembo Yangotikala Jean-christophe

    j’invite Lemaire et Tom à la modération.Ces réactions risquent de ternir l’image de cette initiative sociale de grande portée surtout dans son aspect de valorisation des glaneurs et de création des liens. De kinshasa en RDCongo/Afrique il y a lieu d’adapter de telles initiatives pour réduire la fracture sociale à la base de la fragilité de nos institutions.
    Merci à toute personne qui intervient dans cette chaîne de valeurs.

    • Merci de votre commentaire. Certes, le billet souligne la démarche d’Anna, une sorte de conversion, on oublie d’y signaler qu’elle est également présidente de la « tente des glaneurs » du 19 ème – c’est vrai, mais l’essentiel n’est-il de mettre en valeur ce genre d’initiative, d’autant que le blog est lu non seulement en france mais dans le monde entier. Pour « lecrapaud.fr ».

  • Si l’orga n’enchaîne pas les bénéficiaires à la manière de certaines assos « caritatives » que je connais ; par fichage et/ou cotisation obligatoire + participation parfois + chère que Lidl ! Alors c’est bien. C’est toujours ça de gaspillé en moins. Au départ mon combat était uniquement écologique et beaucoup contre les décharges sauvages. C’est à travers ça que j’ai découvert le gaspillage. J’ai plus de quarante piges de pratique, je suis donc une petite référence à moi tout seul, d’ailleurs la presse locale en a parlé. Je biffe maintenant plus contraint par la pauvreté qu’autrefois, la maladie m’ayant condamné, et c’est effarent ce que je ramasse, et pas qu’en alimentaire : j’ai équipé des commerçants en papeterie par exemple (et entre autres) et même des écoles (en France et à l’étranger) dans ce domaine. Quant à la nourriture, outre que j’y ai consacré quelques articles et un album photo qui ne rends compte que partiellement de ce que je trouve. Hors, mézigue, je ne fais que dans le gaspillage de particulier, rarement de commerçants indépendants parce qu’avec certain(e)s j’ai monté un système de troc informel : invendus contre objets de récup… Je vous invite à visiter « Canal-Décharge » vous verrez, malgré les pirates qui ont sabordés certains papiers, en cinq piges d’archives (ou 6 je sais plus) ; vous trouverez matière à réflexion.

      • Anna Salwerowicz-Morisseau

      Il me semble que personne n’enlève la paternité de la création de la Tente des glaneurs à Jean-Loup Lemaire ; l’article le mentionne bien, d’ailleurs.
      Quant aux bonnes idées, elles appartiennent à de tout le monde (comme les mauvaises). C’est la raison pour laquelle, une action comme celle de la Tente des glaneurs, devrait être essaimée, déployée et partagée par le plus grand nombre. J’espère, d’ailleurs, que d’autres initiatives de ce genre vont voir le jour, peu importe le nom. Unissons nos forces pour lutter contre le gaspillage alimentaire et contribuons ainsi positivement à préserver la planète.
      Anna Salwerowicz-Morisseau

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