Comment bâtir une ville durable ? À partir de cette question, la municipalité de Malmö, aidée du WWF (Fonds Mondial pour la Nature) et des habitants, a réhabilité les quartiers laissés en friche par la crise industrielle des années 1990. Troisième ville de Suède, Malmö compte plus de 300 000 habitants. L’espace urbain laissé libre par la crise a permis à deux éco-quartiers de sortir de terre : Augustenborg et Bo01/Western Harbour (3500 habitants et 6000 employés). Ils ont d’abord servi de champ d’expérimentation urbaine et désormais de vitrine susceptible d’inspirer d’autres grandes villes. L’enjeu est de taille puisqu’à l’heure actuelle la moitié de l’humanité vit en ville et que le mode de vie urbain engendre 75% des émissions de gaz à effet de serre.
L’importance de la planification
Nouvel urbanisme, usage des énergies renouvelables, bâtiments soumis à des normes de construction, d’isolation et de consommation d’énergie plus strictes, mobilité douce,… Autant d’éléments qui ont été intégrés dès l’élaboration des quartiers. Ce travail résulte d’une collaboration entre les autorités, les habitants et aussi le WWF. L’association spécialisée dans la protection de l’environnement propose son expertise et des idées novatrices que la ville applique. Pour évoluer, Malmö a su profiter des friches laissées par la crise pour prendre un nouveau départ. En effet, bâtir sur des terrains dégagés se montre plus facile que de tenter d’adapter le bâti déjà existant. L’autorisation de construire est délivrée en fonction d’un cahier des charges avec un systèmes de points à valider. Par exemple, on gagne des points si on privilégie des pavements en briques au lieu du bitume pour favoriser l’écoulement des eaux. Ne pas satisfaire la norme de consommation énergétique interdit toute nouvelle construction.
Les déplacements sont pris en compte dès l’élaboration des quartiers. La ville se compose de grandes artères qui permettent d’aller rapidement en bus ou en vélo d’un endroit à l’autre. En plus des pistes cyclables et des aires de covoiturage, des lignes de bus (qui roulent tous au biogaz) sont ouvertes avant même que le quartier ne soit entièrement sorti de terre afin que les habitants soient déjà connectés au reste de la ville et n’aient ainsi pas d’excuse valable pour circuler en voiture…
Une ville qui s’adapte à son environnement
Située en bord de mer, la ville est exposée aux vents. Toutefois, pour pallier à ce désagrément, les urbanistes ont imaginé, derrière une première rangée d’immeubles plus élevés, des rues étroites et sinueuses qui empêchent le vent de s’engouffrer entre les habitations. Des plans directement inspirés de cités médiévales… Ces rues permettent tout juste à un véhicule motorisé de passer si besoin est, il s’agit également d’une manière indirecte de dissuader les habitants d’utiliser leur voiture.
Certains quartiers de la ville faisaient face à des soucis d’inondation. Pour y remédier en partie, 10.200 m2 de toits végétalisés ont été expérimentés. Ils absorbent 50 % des eaux de pluie, et assurent, de plus, une meilleure isolation. Depuis leur mise en place, aucune inondation causée par des pluies n’a été constatée, alors qu’auparavant 3 à 4 fois par an les sous-sols des habitations étaient envahis par les eaux.
Une ville autonome
Sur le plan énergétique, Malmö a, bien sûr, développé le solaire et l’éolien. Avec un parc de 45 éoliennes offshore au large de la ville, qui fournissent 40 % de l’électricité de Malmö, mais aussi avec de toutes petites installations en intra-muros. A cela s’ajoute la présence de panneaux solaires pour chauffer l’eau ou produire de l’électricité. La ville joue aussi de sa proximité avec la mer avec le développement d’une technologie innovante dans laquelle l’eau de mer stockée en sous-sol sert à chauffer les bâtiments. Ces dispositifs complémentaires permettent à 1.000 appartements de Western Harbour un approvisionnement à 100% en énergies renouvelables locales.
Les déchets ne sont pas en reste, car à Malmö, ils sont valorisés de deux façons : en étant recyclés ou en devenant de l’énergie. Les déchets organiques sont convertis en biogaz. Dans le gratte-ciel Turning Torso, un système de vide-ordure permet même de les collecter directement dans les logements. Au final, seul 5% des déchets ménagers finissent en décharge.
Mais l’énergie qu’on économise le mieux, c’est celle qu’on ne produit pas. Ainsi, des habitations dont l’efficacité énergétique est telle qu’elles ne nécessitent pas de chauffage (constructions dites « passives ») sont actuellement testées à Flagghusen : la chaleur du logement ne provient que du soleil et de l’énergie dégagée par les habitants eux-mêmes.
Une ville pour tous
Pour éviter l’écueil d’un quartier « pour riches », Western Harbour a été conçu pour accueillir la mixité sociale : des logements d’étudiants côtoient une maison de retraite, les appartements ont des loyers attractifs et des petits restaus occupent les pieds des immeubles pour animer le quartier.
Pari gagné, car ce nouveau front de mer, écologique et durable, a conquis les habitants de Malmö qui vont volontiers y flâner.
Toit végétalisé
Le Turning Torso
Western Harbour
Par Julien Leprovost
Ecrire un commentaire