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Carton jaune contre la pêche illégale en Thaïlande

TO GO WITH STORY: France-Thailand-fishing-food-rights-work,FOCUS by Emmanuelle Michel with Delphine Thouvenot Workers select prawns at a market in Samut Sakhon province, a suburb of Bangkok on October 22, 2014. Thailand went on a charm offensive in defence of its prawn industry this week, seeking to convince Europeans that it is responding to allegations of slavery and torture in its fisheries sector. AFP PHOTO / PORNCHAI KITTIWONGSAKUL
Des travailleurs trient des crevettes en Thaïlande. © AFP PHOTO / PORNCHAI KITTIWONGSAKUL

L’Europe menace la Thaïlande d’interdire l’importation de ses produits de la mer sur le marché commun. La Thaïlande est en effet soupçonnée de laisser faire la pêche non-déclarée et de fermer les yeux sur les conditions de travail, parfois proches de l’esclavage. L’Union européenne estime que la réglementation et les pratiques des pêcheries thaïlandaises ne sont pas conformes aux normes internationales.

Ces pratiques sont dénoncées par une coalition d’ONG dont Oceana, Pew ou encore Environment Justice Foundation. « Les autorités thaïlandaises exècrent peu de contrôles sur leur flotte de pêche. De nombreuses activités détruisent les stocks de poissons et l’environnement. Le recours à l’extrême violence et au travail forcé sur certains navires est établi », résume Steve Trent, directeur de l’ONG Environmental Justice Foundation.

Carton jaune pour la Thaïlande sur la pêche illégale

Il s’agit d’un avertissement pour la Thaïlande, 3e exportateur mondial de produits de la mer. Ses exportations vers l’UE lui ont rapporté 319 millions de dollars en 2014, selon le Wall Street Journal. Le pays dispose de 6 mois pour mettre en place des bonnes pratiques en matière de pêche, sans quoi les importations de produits halieutiques vers l’Europe pourraient être proscrites.

La Commission annonce sa démarche dans un communiqué de presse : « Si la situation ne s’améliore pas, l’Union pourrait recourir à une interdiction d’importation des produits de la pêche en provenance de Thaïlande. Une telle mesure a été prise par le passé à l’encontre du Belize, de la Guinée, du Cambodge et du Sri Lanka. L’année dernière, les importations en provenance du Belize ont été interdites, mais en raison des efforts de réforme réalisés par les autorités, elles sont désormais autorisées. »

Jouer sur le poids de l’Europe pour changer les pratiques de pêche

L’Union européenne est le premier importateur mondial de poissons. Depuis 2010,  une réglementation interdit la commercialisation de produits issues de la pêche illégale. Or, entre 11 et 26 millions de tonnes de poissons sont capturés illégalement dans le monde, pour une valeur marchande estimée jusqu’à 19 milliards d’euros. Pour lutter contre ce phénomène, l’UE mène des discussions bilatérales avec ses partenaires pour qu’ils adaptent leurs pratiques. Si besoin est, elle lance des avertissements, voire interdit l’importation de produits de la pêche. A l’heure actuelle, les importations du Sri Lanka, de la Guinée et du Cambodge sont interdites.

« C’est un bon moyen pour promouvoir le changement, estime Maria-Jose Cornax de l’ONG Oceana. De nombreux pays ont rapidement changé leurs pratiques grâce à la réglementation européenne, mais elle ne fonctionne que si l’Europe est un débouché commercial majeur. Le carton jaune joue le rôle d’avertissement et entraîne un changement, si rien ne bouge le carton rouge prohibe alors l’entrée des prises illégales en Europe. »

Corée et Philippines reconnues pour leur bonne gouvernance de la pêche

« Sur une note plus positive, la Commission reconnaît que deux nations pratiquant la pêche, à savoir la Corée et les Philippines, ont procédé aux réformes appropriées de leurs systèmes juridiques et disposent à présent des moyens nécessaires pour lutter contre la pêche illicite. », se réjouit la Commission européenne.

La Corée et les Philippines avaient été averties respectivement en 2013 et 2014. En 2013, les Philippines ont exporté 230 millions de dollars de poissons vers l’Europe. Le pays a dû changer sa réglementation afin de sanctionner plus lourdement les grands navires de pêche qui vont pêcher dans des zones réservées aux petits navires. De son côté, la Corée a mis en place un dispositif de suivi de ses navires et une loi qui autorise la confiscation des prises dans les ports coréens sur leur origine est illicite.

L’Europe démontre ainsi l’influence que peut avoir un client sur ses fournisseurs. Et qu’il est possible de leur imposer des bonnes pratiques. Maria-Jose Cornax, responsable campagne pêche chez Oceana se félicité de ce système  : «  Nous, les ONG, nous sommes très contents de ce système du carton jaune et de carton rouge adopté par l’Europe. Il montre des résultats très probants : la Corée a rapidement changé ses pratiques. Il envoie un signal fort aux pays pour les inciter à se tourner vers une pêche durable et respectueuse des droits humains. Les Etats-Unis, sous l’impulsion du président Obama, envisagent aussi de mettre en place des mesures similaires pour lutter contre la pêche illégale. »

Julien Leprovost

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