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Réaction du climatologue Jean Jouzel à la COP25 : « ce fut une COP inutile »

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Le climatologue Jean Jouzel. Il nous accordé un entretien pour réagir à la COP25 en Espagne © Ludovic MARIN / AFP

Le climatologue Jean Jouzel, ancien vice-président du groupe scientifique du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) a assisté, à Madrid, à la COP25 qui vient de s’achever sur un constat d’échec de la communauté internationale à relever ses ambitions climatiques. Retour sur une session de négociations climatiques assez techniques jugée décevante par les observateurs.

Quel bilan tirez-vous de cette COP25 ?

Cette COP en Espagne n’a rien apporté. Il n’y a aucune avancée sur le problème des quotas de carbone : certains pays veulent garder leurs crédits carbones d’avant 2020. Les pays en développement ne sont pas sortis satisfaits de ce qui est envisagé sur les pertes et préjudices et sur les financements malgré de petites avancées sur la question.

C’est donc plutôt une déception ?

Comme scientifique, je suis très déçu car j’espérais que cette COP allait marquer le lancement de l’ambition de l’Accord de Paris. Il reste beaucoup à faire pour l’appliquer. Seuls 80 pays se sont engagés à revoir à la hausse leurs ambitions, mais ils ne représentent que 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Cela laisse craindre, pour 2020, l’absence d’engagements supplémentaires solides. Et, ce malgré l’engagement de l’Union européenne de diviser par deux ses émissions qui demeure une bonne nouvelle. Il faut pourtant absolument rehausser l’ambition de l’Accord de Paris.

Jean Jouzel à propos de la COP 25 : « Pour la première fois en 19 ans de négociations climatiques, je repars sans avoir vu d’avancées. »


Comment l’expliquez-vous ?

Pour la première fois en 19 ans de négociations climatiques, je repars sans avoir vu d’avancées. D’habitude, il y en a certaines, elles sont parfois très techniques. Toutes les COP ne se valent pas, certaines servent d’étapes de transition. Là, ce fut une COP inutile.

 

[Que retenir de cette COP25 en vidéo]

Avez-vous une impression de Copenhague bis ?

Non, impossible de comparer le sommet en Espagne avec son prédécesseur au Danemark parce que les deux conférences n’avaient pas la même dimension. Il y a 3 COP majeures qui scellent des accords : Kyoto en 1997, Copenhague en 2009 et Paris en 2015. À Copenhague, il y a quand même eu un accord. La COP25 à Madrid était une réunion intermédiaire pour préparer la mise en œuvre de l’Accord de Paris. La prochaine COP importante sera 2020. Nous pouvons encore rêver de rattraper ce qui ne pas été fait durant cette COP25.

Qu’attendre du prochain sommet sur le climat en 2020 ?

Il marquera le véritable lancement de l’Accord de Paris, il faut donc que ses modalités de mise en œuvre soient bouclées et acceptées. Il faut aussi que des discussions soient mises en place pour relever le niveau des ambitions climatiques. Or, c’est dommage, de tels échanges n’ont pas encore été initiés à Madrid.

Si le message des scientifiques et le constat de l’urgence ne suffissent pas, que faut-il pour que la situation bouge ?

Le sujet devient éminemment politique et dépend donc de la mobilisation qu’il suscite. On le voit avec la mobilisation de la jeunesse. En démocratie, le combat passe par le bulletin de vote, chacun d’entre nous peut faire quelque chose. Par exemple, aux élections européennes, les écologistes ont obtenu de bons scores, la Commission européenne a décidé de mettre au centre de son action la lutte contre le changement climatique.

Les scientifiques font leur travail en alertant avec notamment les rapports du GIEC dont les travaux ont été reconnus, à l’exception de certains pays qui ne voulaient pas en entendre parler. Ce refus de la science m’interroge.

 

Jean Jouzel : « Un monde bas carbone implique un nouveau mode de développement qui n’est pas tourné vers la croissance du PIB. La croissance économique se révèle incompatible avec la lutte contre le réchauffement climatique. »

Justement, le manque d’engagement des décideurs politiques pose une question : la transition écologique et les changements profonds appelés dans les rapports du GIEC peuvent-ils servir de base à un projet de société ?

Oui, cette transition vers un monde bas-carbone devra se faire. Les jeunes d’aujourd’hui ne peuvent pas accepter un monde avec 4 ou 5 degrés de plus.  Ou bien on opère la transition, ou bien on la subit. Elle se fera à un moment. Mais, peut-être sera-t-il trop tard. Ça l’est déjà pratiquement.

Nous avons montré qu’un monde bas carbone est un monde viable, que la transition énergétique se traduira par des créations nettes d’emplois. Un monde bas carbone implique un nouveau mode de développement qui n’est pas tourné vers la croissance du PIB. La croissance économique se révèle incompatible avec la lutte contre le réchauffement climatique. Ce nouveau projet de société doit aller vers plus d’équilibre, de justice et plus de solidarité. Sans cela, nous n’y arriverons pas.

Les points de basculement et de non-retour sont au cœur  des préoccupations, est-il encore possible de changer la donne ?

Il est toujours possible de faire le maximum. Il faut diviser par 2 nos émissions entre 2020 et 2030. C’est un sacré virage à prendre. Nous pouvons espérer une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre assez rapidement. Mais, actuellement, même l’objectif de 2 degrés me semble assez difficile à tenir.

Propos recueillis par Julien Leprovost

11 commentaires

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    • Michel CERF

    On peut faire plus mais le constat est clair : croissance économique incontrôlable , pollution généralisée , toujours plus de pesticides , de déforestation , des COP inutiles , des décisions reportées ou abandonnées , tout ce qu’il faut pour préparer le grand suicide collectif .

    • Entre le climato-sceptique Claude Allègre et le climato-réaliste Jean jouzel il y a la réalité des faits: un climat qui se dégrade rapidement avec des conséquences financières et humaines parfois catastrophiques.

      Le porte-parole des lutins thermiques fait amende honorable: il lui a tout de même fallu 5 ans pour faire le parallèle entre sa maison et notre planète et réaliser que si l’on améliore l’isolation d’une maison la température à l’intérieur de celle-ci augmente progressivement si l’on ne change pas le réglage sur la chaudière

      Heureusement lorsque le climatologue Jean jouzel nous a fait part de ses inquiétudes il a pressenti que c’était lui qui avait raison et il a réfléchi pendant ces 5 ans à ce qu’il allait falloir FAIRE pour atténuer le réchauffement climatique. Il espère avoir l’occasion d’exposer à l’IESF ce qui pourrait être fait dans notre grande métropole Paris, point de départ d’une prise de conscience mondiale de ce qui nous attend si nous ne faisons rien

        • Jean-Pierre Bardinet

        Rectificatif : Claude Allègre est un climato-réaliste et Jean Jouzel un climato-crédule, qui croit que la pseudo-science du GIEC est digne de foi.

    • sophie

    Difficile de croire à un avenir radieux. Je ne vois personne autour de moi changer notablement ses habitudes de vie et de confort: la majorité des gens est obnubilée par l’ argent et ne fera que pleurer en accusant les politiques quand la vie sera devenue intenable à cause de la dégradation de la Planète.
    Perso je continue d’ apporter la goutte d’ eau de colibri et ça atténue un petit peu ma peine; en outre j’ en vois les effets comme par exemple un terrain sans pesticide avec moult biodiversité

    • Mon opinion Sophie est qu’ il ne faut pas être passif et attendre sans rien faire que la vie soit devenue intenable sur terre pour agir.

      La détérioration du climat que l’on constate actuellement est la conséquence d’une politique fiscale sur les prix de l’énergie inadaptée et d’un manque de vision de l’exécutif sur la nature et les avantages des
      nouvelles chaînes énergétiques qui vont devoir remplacer les anciennes

      Nos responsables politiques ont le devoir d’expliquer dans le détail comme j’ai commencé à le faire voir

      http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/WA-QR.pdf

      que la modification de nos chaînes énergétiques actuelles ne changera pas notablement nos habitudes de vie et de confort.

      Il appartient aux politiques de mettre en place une politique fiscale qui incite à l’action et soit telle que l’individu ne se sente pas responsable de l’immobilisme actuel et de la dégradation de la Planète au prétexte qu’il serait obnubilé par l’ argent

      Quoi qu’il en soit, que le politique soit responsable ou non de la situation actuelle sur terre ce n’est pas en attendant sans rien faire que l’on va solutionner nos problèmes

    • Jean-Pierre Bardinet

    Ce flop de la COP 25 était prévisible, les mêmes causes produisant les mêmes effets que pour toutes les COP précédentes. Pour son développement social et économique, la Chine a besoin d’une électricité pilotable et compétitive, et elle a construit et continuera à construire des centrales à charbon et à gaz jusqu’en 2030, comme elle l’avait annoncé à la COP 21. En fait, les PED ont bien compris que leur développement social et économique est basé sur une électricité pilotable, compétitive, donc produite par des centrales à charbon ou à gaz. C’est pour cela que ces COP ne servent à rien, si ce n’est à faire délirer des idéologues radicaux, des politiques, des ONG radicales et des fonctionnaires. Quant à la tendance au réchauffement, elle n’est que d’environ +0,1°C/décennie depuis près de 20 ans, malgré une inflation de nos émissions de CO2, ce qui confirme qu’il n’y a aucune corrélation, donc aucune relation de causalité, entre nos émissions et les variations de température.

  • Comme je l’ai déjà dit sur Goodplanet il y a COP et COP et sur l’inutilité des COP annuelles nous sommes pratiquement d’accord monsieur Bardinet. Concernant
    l’aspect pratique et le COP des pompes à chaleur c’est une autre histoire

    Pour ce qui concerne le réchauffement climatique vous paraissez bien sûr de vous et un peu seul contre tous mais je crois vous avoir déjà expliqué monsieur Bardinet que le problème principal n’est probablement pas seulement de savoir si la température augmente de 1°C dans 100 ans avec une évolution naturelle du genre Milutin Milankovic ou de 5°C comme on peut le craindre. Le problème qui pourrait bien être le plus important pour nous est qu’il faut se faire à l’idée que dans 100 ans il n’y aura plus de pétrole et qu’il faudra bien à cette échéance satisfaire nos besoins en énergie sans payer pour des raisons sociales le kWh à 17 centimes d’€

  • Pour etre plus precis je vais m’exprimer différemment

    Comme je l’ai déjà dit sur Goodplanet il y a COP et COP

    Sur l’inutilité de ces COP annuelles nous sommes pratiquement d’accord monsieur Bardinet.

    Pour l’aspect pratique de notre transition et le COP des pompes à chaleur avec l’eau qui pourrait être le catalyseur d’une action en profondeur c’est de toute évidence une autre histoire

    Concernant le domaine complexe du réchauffement climatique vous paraissez bien sûr de vous et un peu seul contre tous.

    Il y a comme vous le savez l’évolution periodique naturelle et lente du climat du genre Milutin Milankovic mais il faut tout de même reconnaître que la température qui a augmenté de 1°C en 100 ans depuis l’ère industrielle pourrait bien croître cette fois exponentiellement en raison d’une économie mondiale qui va quadrupler selon l’OCDE à l’horizon 2050

    Quoiqu’il en soit le problème principal à court terme d’homo sapiens sur terre ne semble pas etre ce problème de température mais
    le fait que les energies non renouvelables portent bien leur nom et que dans 100 ans les produits fossiles seront derrière nous. Il faudra bien à cette échéance satisfaire nos besoins en énergie sans payer pour des raisons sociales le kWh électrique à 17 centimes d’€

    • Jean-Pierre Bardinet

    @Grossmann
    1) Depuis près de 20 ans, la TMAG (température moyenne annuelle globale) est quasiment stable, la tendance n’étant que de +0,1°C/décennie, malgré une très forte inflation de nos émissions de CO2, ce qui veut dire que nos émissions n’ont aucun effet mesurable sur la température.
    2) La consommation mondiale d’énergie primaire est couverte à plus de 95% par le gaz, le pétrole et le charbon. La production de gaz et de pétrole de shale a changé la donne, et on ne sait pas très bien quand les réserves mondiales seront épuisées, d’autant que les techniques de détection et de forage continueront à progresser. Sans doute bien au-delà de la fin de ce siècle. Wait and see.
    3) Plus de 97% de la consommation primaire est fournie par le charbon, le gaz, le pétrole, l’hydraulique et le nucléaire. La part des EnR intermittentes reste marginale. Compte tenu de leur intermittence, elles ne pourront en aucun cas couvrir la demande mondiale. L’avenir, pour plusieurs millénaires, c’est le nucléaire génération IV (238 U et/ou 232 Th) , puis, mais pas avant 100 ans, la fusion nucléaire (projet ITER).

    • Daniel

    @Bardinet
    C’est d’ailleurs confirmé par le CNRS, le CEA et Météo-France ici même
    https://www.actu-environnement.com/ae/news/CNRS-MeteoFrance-CEA-simulations-climat-2-7-degres-rechauffement-climat-2100-accord-Paris-34057.php4
    Dis-donc Bardinet tu n’aurais pas un peu trop forcé sur le Negrita par hasard ?

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