EDITO : Le courage, la résignation ou le sursaut de Nicolas Hulot

Éditorial sur l’impact du départ de Nicolas Hulot entre son courage de suivre ses convictions, sa résignation face aux lenteurs et l’appel au sursaut.

Personnalité forte de l’écologie en France et appréciée du grand public, connaisseur des dossiers, Nicolas Hulot vient de démissionner de son poste de ministre de la Transition écologique et solidaire. Il l’a annoncé mardi 28 août dans un entretien à France Inter.

Il dresse un constat pessimiste sur la capacité d’action du gouvernement en matière d’environnement. Il reconnait un constat d’échec et de lassitude. « Je ne veux pas me mentir. Je ne veux pas encore donner une fois ce sentiment que, si je repars, c’est parce que j’y crois », affirme Nicolas Hulot.

Son départ du gouvernement semble un aveu d’échec pour la mise en place de mesures effectives en faveur de l’écologie et de la solidarité. Alors que plus que jamais, l’été a montré la réalité des changements climatiques en cours, Nicolas Hulot admet que les mesures prises dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi dans d’autres domaines comme la lutte contre l’artificialisation des sols ou encore la préservation de la biodiversité, ne sont pas à la hauteur et que la préservation de l’environnement butte sur l’impératif de la politique économique : créer de la croissance.

C’est finalement peut-être là le point le plus regrettable : même si le diagnostic des problèmes environnementaux est connu et partagé, il fait quasiment l‘unanimité, malgré un discours volontariste et des avancées, certes insuffisantes, trouver des solutions effectives tarde et ne fait pas consensus.

Il convient de s’interroger sur les raisons de la difficulté de traduire l’urgence écologique en mesures. Est-ce trop compliqué ? Trop impopulaire, auquel cas le courage politique ne suffit pas ? Est-ce le fait d’un manque de soutien politique et électoral aux défenseurs de l’environnement ? Est-ce le fait d’une éducation ou d’une culture de la génération au pouvoir qui est moins sensible à l’environnement que les plus jeunes (si tant est que la sensibilité écologique soit corrélée à l’âge ? Est-ce le fait que vouloir faire une transition signifie changer de modèle et que beaucoup ont peur de l’inconnu vers lequel cela signifie se diriger ?

Depuis trop d’années, l’écologie patine, souffre d’atermoiements, d’hésitations et à force d’attendre, il semble trop tard pour éviter des catastrophes pourtant annoncées de longue date. Aujourd’hui, elles se matérialisent, deviennent concrètes et les empêcher devient donc plus urgent. Or, c’est une action constante sur le temps long qui est nécessaire pour résoudre, à la racine, les problèmes du changement climatique et de l’érosion rapide de la biodiversité. Il s’agit de le faire au nom de l’intérêt général : c’est-à-dire assurer le maintien des conditions de survie de l’espèce humaine. Il semble pourtant que nous ne soyons non seulement pas en mesure d’aborder collectivement et surtout internationalement ces problèmes tant les divergences restent fortes au niveau mondial, mais aussi au sein des pays, y compris le nôtre, pour qui les enjeux écologiques sont supposés être une priorité depuis des décennies.

Il y a sans doute un peu de tout ça dans la décision de Nicolas Hulot. Il y a du courage, celui de dire une forme de vérité et de rendre compte aux Françaises et Français, de la résignation et peut-être un moyen de susciter le sursaut. C’est l’acte d’un homme de convictions confronté à des obstacles qu’il a cependant tenté de surmonter, sans succès probant à ses yeux. Nicolas Hulot n’est pas l’homme providentiel, il n’a pas pu être celui qui change la donne et amène de nouveaux paradigmes. Mais, en prenant ses responsabilités, il lance aussi un appel au sursaut. Il envoie un signal pour se ressaisir : l’écologie ne peut progresser que si elle est portée par le plus grand nombre de citoyens collectivement et que cela se traduit par des actes. Arriver à lui redonner une place, parvenir à en faire un vrai axe de développement et d’élaboration des politiques sera la meilleure conséquence de cette démission. Maintenant, aux citoyens de prendre le relais à leur échelle pour traduire les convictions en actions.

Julien Leprovost, responsable éditorial du magazine GoodPlanet.Info

4 commentaires

Ecrire un commentaire

  • Effectivement , il n’est pas évident de travailler sans répit pour l’environnement et la qualité de vie sur notre planète. La transition se heurte à l’inertie du système et aux mode de vie des gens. Ce n’est qu’en modifiant progressivement mais aussi fondamentalement nos habitudes et comportement personnel que la transition pourra réellement s’installer. Exemple les mobilités : circulons plus à pied , à Vélo , en transport en commun et en covoiturage. Demandons à nos municipalités et régions les infrastructure qui favorisent ce type de transport: trottoir, piste cyclable , bus en site propre, parkings multimodaux… Autre exemple : la nourriture: redécouvrons la joie du potager, achetons des produits locaux sains et bios dans les commerces de proximité; achetons des produits du commerce équitable… Pour l’énergie , isolons nos habitations , installons des productions d’énergie propre( éolien , solaire , géothermie, hydraulique.. pompe à chaleur… Le monde économique et politique suivra la demande des citoyens surtout si ils confirment leurs choix dans les urnes. Plus d’Europe responsable et citoyenne qui régule et contrôle pour empêcher les commercialisations des produits nocifs; plus d’éducation des jeunes pour devenir des citoyens libres et responsables par rapport au monde « consumériste »qui asservi l’humain et détruit souvent l’environnement .Think global et act local, c’est ce que Mieux vivre à Waterloo mouvement citoyen local réalise pour la « transition » vers « Demain » à Waterloo , ville hyper consumériste,embouteillée et polluée par les voitures, et gaspilleuse d’énergie, soumise à la spéculation immobilières et à la destruction des espaces verts! Un long chemin donc pour une minorité agissante qui veut rétablir la qualité de vie à Waterloo! » Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre!

    • Claude Renaud

    Tant que nous continuerons à pomper le pétrole comme nous le faisons aujourd’hui, rien ne sera
    possible. Nous consommons chaque jour, 300 millions de barils, comment voulez-vous, dans ces conditions, réduire nos gaz à effet de serre? C’est tout simplement impossible.
    La mondialisation empêche tout changement de paradigme, avec les échanges autour de la Planète,
    toujours plus importants. Guerre commerciale oblige.
    Les Cies aériennes transportent 4 milliards de passagers à l’année et espèrent bien doubler ce chiffre
    dans les quinze années à venir.
    Les classes aisées n’ont pas du tout envie que ça change et entendent bien profiter des dernières
    technologies, polluantes ou non. Et si on est vraiment riche, pourquoi se priver d’un jet personnel.
    Les nantis n’ont pas la fibre écologique, c’est le moins qu’on puisse dire, et ne sont pas sensibles à
    l’éthique.
    La France ne représente que 4% des gaz à effet de serre, alors, ce que nous pouvons faire ne peut
    être qu’une question de conscience. Donc, à chacun de prendre conscience de son bilan carbone, mais il est certain, que seule une minorité, aura cette conscience-là.
    L’Urgence est là, et il va nous falloir des décennies pour agir.

  • La production electrique solaire d’origine voltaique associé à la  » water economy de l’enthalpie » permettrait de satisfaire nos futurs besoins en énergie plus rapidement que ne pourrait le faire le nucléaire conventionnel et encore moins la fusion nucleaire contrôlée

    • sophie

    Merci d’ avoir soutenu Nicolas Hulot , probablement le ministre les plus sincère, déterminé et compétent que nous ayons eu à ce poste.
    Hélas les Philippe et Macron sont si loin d’ avoir la sensibilité et la conscience éveillée pour ce qui concerne l’ urgence Climatique , la Sixième extinction de masse.. bref la place de l’ humain au milieu du Tout .

Patrick Criqui, directeur de recherche au CNRS à propos des enjeux de la COP29 : « réduire les émissions de gaz à effet de serre est moins coûteux dans les pays du Sud que dans les pays du Nord »

Lire l'article