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Entre pollution et incendies, le Brésil suffoque

Militant anti pollution Brésil

Un manifestant et sa pancarte "Nous voulons respirer" lors d'une marche pour la justice climatique à Sao Paulo, au Brésil, le 22 septembre 2024 © AFP Miguel SCHINCARIOL

Brasilia (AFP) – Valderes Loyola a dû changer ses habitudes: « Quand je sors, je mets mon masque », dit à l’AFP cette septuagénaire de Brasilia, bouche et nez recouverts par le bout de tissu. La faute à la pollution de l’air engendrée par les feux de végétation qui ravagent le Brésil.

Depuis des semaines, les incendies font rage dans le plus grand pays d’Amérique latine, déclenchés le plus souvent par l’homme mais favorisés par une sécheresse extrême liée au changement climatique.

La capitale est restée plongée plusieurs jours dans un épais nuage de fumée qui voilait les bâtiments aux courbes futuristes conçus par l’architecte Oscar Niemeyer.

Une quarantaine d’écoles ont dû y fermer leurs portes à un moment ou un autre. Dans l’un des plus grands hôpitaux de la ville, les consultations pour problèmes respiratoires ont été plus de vingt fois supérieures à la moyenne.

[Lire aussi: Au Brésil, la fumée d’incendies hors norme fait suffoquer et inquiète]

Au total, Brasilia a connu quelque 160 jours sans une goutte de pluie. Pour supporter la sécheresse, Valderes Loyola, femme au foyer de 72 ans, a déployé chez elle des seaux d’eau et des serviettes mouillées, tout en laissant un ventilateur allumé.

Les nuages de fumée toxique couvrent une bonne partie du territoire, « jusqu’à 80% » la semaine dernière selon la chercheuse Karla Longo, de l’Institut de recherches spatiales (INPE).

Comme au temps de la pandémie de Covid-19, les masques sont de retour également à Porto Velho et dans d’autres villes d’Amazonie, où la plus vaste forêt tropicale de la planète subit « ses pires incendies en deux décennies », selon l’observatoire européen Copernicus.

[Lire aussi: Au Brésil, sécheresse et incendies hors norme inquiètent le secteur agricole]

Ventes de collyre

Quant à Sao Paulo, la plus grande mégalopole d’Amérique latine, elle a figuré à plusieurs reprises en tête du classement des villes les plus polluées au monde de la société IQAir, basée en Suisse et spécialisée dans la surveillance de la qualité de l’air.

Au moins 40% des habitants de Sao Paulo affirment que leur santé a été « très affectée » par la fumée, et 29% à Rio, d’après un sondage publié il y a quelques jours par l’institut Datafolha.

[Lire aussi: La fumée des incendies en Amazonie se répand à travers le Brésil]

Dans les pharmacies, les ventes de collyre et de sérum physiologique ont bondi.

Les spécialistes estiment que respirer les fumées toxiques issues des incendies de végétation peut se révéler aussi nocif que fumer quatre à cinq cigarettes par jour.

« La tendance est que cette situation se reproduise tous les ans », explique à l’AFP Evangelina Araujo, médecin et présidente de l’Institut Air, une ONG qui bataille pour que les habitants jouissent d’un air sain.

L’inquiétude est palpable: selon l’outil statistique Google Trends, les recherches sur internet sur des termes comme « qualité de l’air » ou « purificateur » ont atteint des sommets.

Dans de nombreuses villes brésiliennes, les couchers de soleil ont pris une teinte rouge orangé, un phénomène directement lié à la pollution selon les experts.

Ciel grisâtre

A Rio, le ciel habituellement bleu au-dessus de paysages sublimes entre mer et montagne est souvent apparu voilé ces dernières semaines, prenant une teinte grisâtre.

« Ce ciel, c’est horrible à voir », « le soleil ne se voit pas bien, il est extrêmement brumeux », s’affole Luan Monteiro, un étudiant de 20 ans. Et ce fumeur constate avoir toussé ces derniers temps « plus que la normale ».

Le président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva a admis récemment que le pays n’était « pas préparé à 100% » pour faire face aux conséquences des incendies, notamment au niveau local.

[Lire aussi: ]Vague d’incendies au Brésil: Lula reconnaît que le pays n’était « pas préparé à 100% »]

Seulement 1,7% des communes disposent de stations pour mesurer la qualité de l’air, déplore Evangelina Araujo.

Et moins d’un quart de ces stations sont à même de mesurer le taux de particules fines (PM2,5), qui peuvent causer des maladies cardiaques ou respiratoires.

Au Brésil, le seuil critique fixé par les autorités est de 60 microgrammes par mètre cube, quatre fois plus que la limite recommandée par l’Organisation mondiale de la santé.

Et selon le plan d’action mis au point par le gouvernement, le pays va mettre plus de 20 ans pour se conformer aux normes internationales, pointe Mme Araujo.

© AFP

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